35 : ulysse revient

Quelle musique ! Quels interprètes !! Le concert d'hier : un des plus beaux de l'année.
C'était encore du baroque, mais italien cette fois : l'opéra "Le retour d'Ulysse dans sa patrie" de Monteverdi (en version concert).
Rassurez-vous, je ne vais pas vous infliger un cours sur l'histoire de la musique italienne : ça m'obligerait à parler de l'opéra italien du XIX°s pour lequel je n'ai aucune affinité (sauf peut-être avec un verre de trop !). J'aurai pu pourtant intituler ma chronique "opéra et apéro" ou "de monte à verdi" ... tant pis !
Car l'opéra de Monteverdi, n'a pas le moindre rapport avec l'opéra de Verdi, sinon la langue.


[Ulysse, Telemaque et Penelope version manga]

Un mot sur Claudio Monteverdi (1567-1643)
Il est le compositeur charnière entre musique "renaissance" et musique "baroque". D'une importance aussi énorme dans l'histoire de la musique que Bach, charnière entre "baroque" et "classique" et Beethoven, charnière entre "classique" et "romantique". Ces trois compositeurs ont été à la fois l'apogée triomphante d'une ère musicale, et les révolutionnaires qui ont défriché de nouvelles voies.

La révolution monteverdienne a été le passage de la polyphonie à la monophonie.
Polyphonie ? : plusieurs voix se mêlent pour chanter le même texte ou des textes différents. La polyphonie imprègne toute la musique de la Renaissance, du XIV° au XVI°s. Exemple type de polyphonie : les madrigaux de Monteverdi, sommets de l'art du XVI°s (écouter également les extraordinaires madrigaux de l'extra-terrestre Gesualdo)
Monophonie ? : une seule voix chante le texte sous forme d'aria (air mélodique et ornementé), ou de recitativo (déclamation chantée-parlée). Exemple type de monophonie : le "lamento de la ninfa" du même Monteverdi.
C'est le développement de la monophonie (ou monodie) qui a permis le véritable essor de l'opéra. Et devinez qui a écrit le premier opéra ? Monteverdi bien sûr : c'est le divin "Orfeo".

Monteverdi a composé plusieurs opéras mais seuls deux autres nous sont parvenus à peu près entiers : l'immoral "L'incoronazione di Poppea" et le très moral "Il ritorno d'Ulisse in patria".
Je connaissais les deux premiers, d'une beauté inégalée (mais c'est un commentaire banal à l'écoute de n'importe quelle œuvre de ce compositeur). Ce troisième opéra ne déroge pas à la règle ...
Et l'interprétation de ce soir en était idéale : l'ensemble "Les Talens Lyrique" créé et dirigé par le claveciniste Christophe Rousset, élève du grand William Christie, accompagné d'une troupe de chanteurs de haut niveau (sauf Ulysse, malheureusement un peu fade)

Cet orchestre est typique de Monteverdi : petit par la taille, grand par les effets.
Quelques cordes ; deux flûtistes jouant de plusieurs sortes de flûtes ; deux clavecinistes jouant clavecins, petit orgue positif et orgue regale à la sonorité nasillarde caractéristique ; deux cornets, instruments à vent en bois et cuir dont la sonorité est intermédiaire entre la trompette et le hautbois et qui est très typique de la musique de Monteverdi ; enfin un "continuo" composé de harpe, luth, violoncelle et lirone, instrument rare, sorte de viole de gambe mâtinée de luth.
Les musiciens des "Talens Lyriques" sont d'une qualité proche de la perfection.
Non, n'ayons pas peur des mots : ils sont tous parfaits !
Quant aux chanteurs : magnifiques, avec une mention particulière pour Hilary Summers (Penelope), mezzo-soprano à la voix chaleureuse et puissante (le lamento du premier acte était à faire pleurer les pierres) ; Emiliano Gonzales-Toro dans le rôle d'un bouffon vraiment marrant et qui est le seul à avoir chanté sans partition ; Anders Dahlin (Telemaque) au très beau timbre de ténor et enfin Ann-Kristin Jones (Junon) soprano d'une puissance vocale impressionnante. Il faudrait les citer tous, tous très à l'aise dans la technique de chant monteverdienne, faite de dissonances et d'ornements acrobatiques.
Trois heures au paradis ...

[Claudio Monteverdi]

(Je me permets de vous rappeler la note de bas de page de ma crochnote n°6 ;
vous aurez également remarqué que tout texte écrit comme ça est un lien !)


3 commentaires:

Anonyme a dit…

Bon, après être allée écouter ça histoire de rigoler un p'tit coup, je me dis que ça serait quand même super chouette si tu pouvais nous mettre ne serait-ce que quelques extraits des concerts dont tu parles :)

Y'a pas mal de façons de faire ça, un de ces 4 je me pencherai sur la question pour te préparer un petit cours !

roch a dit…

ok pour un ptit cours quand tu auras le temps !
mais j'ai peur de ne pas avoir le temps d'insérer des extraits musicaux dans mes crochnotes s'il faut les découper, les formater etc ...

Anonyme a dit…

j'ai lu ta note N° 6 donc, tu n'as aucune compétence musicale, heureusement pour moi car en te lisant mon incompétence m'anéantit: Je me souviens d'un début 1975, où on entendait sans arrêt les "vêpres de la Vierge" (de Monteverdi)