26 : berio, issimo

Le concert d'hier (cité de la musique) était entièrement consacré à Luciano Berio (1925-2003), dont je suis un inconditionnel.

"Sequenza VII" pour haubois
Les Sequenza de Berio sont des œuvres pour instruments solo. Il en a composé une douzaine je crois. Le hauboïste avait un look de rugbyman irlandais mais ce n'est pas pour ça que cette pièce ne m'a pas emballé !
Berio précise que « la partie soliste est mise en perspective [...] par la présence constante d'une [note] tonique qui peut être jouée par n'importe quel autre instrument en coulisse » Pourquoi n'avoir pas suivi cette indication et avoir choisi comme "instrument" en coulisse un écho électronique d'une intensité qui n'avait rien de pianissimo ? Dommage ...

"Chemins II" pour alto et orchestre
Berio a composé ses Chemins d'après certaines de ses Sequenza.
Il les développe pour les faire cheminer en compagnie d'un groupe d'instrumentistes. Ici l'alto est accompagné de neuf instruments : bois et vents, une harpe, un orgue électrique et quelques percussions.
L'ensemble est assez beau mais souffre de la comparaison avec "Voci", œuvre splendide de Berio pour alto et orchestre, beaucoup plus aboutie, complainte tragique et angoissante, se résolvant en déchirements d'une intensité fulgurante.
Belle partie d'alto cependant quoiqu'on aurait aimé une instrumentiste un peu moins sage. La direction de Susanna Mälkki est particulièrement élégante ... ce qui n'est pas le cas de son costard !

"Chemins IV" pour hautbois et orchestre
Ce Chemin-ci est le développement de la Sequenza pour hautbois entendue tout à l'heure. Autant la Sequenza m'avait déçu, autant ce Chemin m'a touché, ce n'est donc pas le rugbyman irlandais qui clochait puisqu'il reprenait là du service !
Le timbre si typé du hautbois nous fait entendre un chant assez triste, mais qui sonne de façon lumineuse, par contraste avec le halo brumeux joué en sourdine par l'ensemble des onze instruments à cordes qui l'accompagne. Comme une dague acérée posée sur un coussin de soie !

"Sequenza VIII" pour violon
Voilà quelque chose qui va rester gravé dans ma mémoire jusqu'à ce que Alzheimer me kidnappe (qu'il me laisse au moins ce souvenir et quelques autres) !
C'est une pièce pour violon seul : 15 minutes de musique pure et de pur bonheur !
Le violon seul, c'est rarement facile à écouter. Ça passe très bien quand c'est les belles partitas de Bach, c'est insupportable quand il s'agit de pièces à visée virtuose genre Paganini.
Ici la virtuosité n'est pas un but sportif destiné à mettre en valeur la dextérité d'un interprète. Elle est au service d'une œuvre d'une grande beauté et d'une grande richesse polyphonique et harmonique.
Elle était interprétée par Hae-Sun Kang, premier(e) violon de l'Ensemble Intercontemporain que je n'avais jamais entendu en soliste. Une artiste grande et mince, sobre, à la prestance hiératique, qui rejoint le petit groupe de ceux qui m'auront marqué. Un jeu fin et délié, précis, sans aucune esbroufe qui nous va droit au cœur et aux tripes. Les dernières mesures en microintervalles d'une extrême rapidité, à la limite de l'audible imposèrent à la salle un silence prolongé, l'émotion était palpable, le public subjugué, avant que n'éclatent les applaudissements libérateurs ...

"Points on the curve to find" pour piano et orchestre
J'étais resté complètement dans mon nuage de bonheur à la suite de la Sequenza précédente et n'ai pas réussi à écouter cette pièce ...
Écrite pour piano et orchestre, il ne me reste qu'une impression de douces vagues se heurtant tranquillement aux rochers. Le pianiste avait l'air d'avoir fumé un joint. Il faudra que je réécoute ça pour me faire une idée !

"Corale" pour violon et orchestre
La seule œuvre de la soirée que je connaissais déjà bien. Elle est le Chemin de la Sequenza VIII pour violon. Il aurait fallu la jouer immédiatement après mais on peut comprendre que les fins doigts d'Hae-Sun Kang aient eu besoin d'un peu de repos !
La partie de violon est très proche de la Sequenza et l'accompagnement orchestral, bien que moins fourni (orchestre à cordes et deux cors), digne de celui de "Voci" évoqué plus haut.
Autant dire qu'il s'agit là d'une œuvre parmi les plus belles !

Berio ? Un grand parmi les grands.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Je sais que vous trouvez tous que roch est trop sérieux je vais donc vous raconter l'avant concert : attablés comme dab au bicloon la serveuse nous accueille ainsi:"alors vous c'est pas la peine de vous demander où vous allez !!"
"ah bon et où allons nous donc?"
"ben au zenith bien sûr!"
"et bien non ma brave dame nous allons à la cité de la ziquemu"
Pour en savoir un peu plus nous avons interrogé internet en rentrant et le concert du zenith c'était ... michel Sardou!!
Nous n'avons donc pas encore le look des intellos de la musique classique(enfin contemporaine!!)et je vous assure que je n'aurais pas échangé Berio contre Sardou!

roch a dit…

tu aurais pu ajouter qu'en nous baladant dans le parc de la villette nous avons eu droit à un groupe de percussionistes afro-brésiliens tout ce qu'il y a de plus déchaînés !
S'il ne s'étaient pas arrêtés, on aurait raté le concert !

Anonyme a dit…

est-ce qu'il vous arrive de vous parler l'un à l'autre. Il vous manque un je ne sais quoi pour être de vrais bobos